Une réunification historique
Dès la fin de 1989, les évènements se sont accélérés à l’Est et à l’Ouest. Après la démission d’Erich Honecker, le mur de Berlin est tombé le 9 novembre de la même année et Helmut Kohl, chancelier de l’Ouest issu de la CDU, a annoncé le 28 novembre un plan en dix points visant à unifier l’Allemagne. Les premières élections libres se tiennent le 18 mars 1990 à l’est. La CDU remporte ces élections sur une ligne d’unification rapide de la République fédérale d’Allemagne (RFA) et de la RDA.
Ce scrutin va permettre la mise en place de réformes ayant pour objectif cette unité. C’est dans ce but qu’est créé le Fonds « Unité allemande » qui finance la restructuration de la RDA, dont l’économie a été durement touchée après des années de domination soviétique. D’autre part, pendant l’été 1990, l’union monétaire est devenue effective et la RDA a adopté le mark de la RFA. C’est également à cette période qu’a été signé le traité d’État sur l’unification par les gouvernements de la RFA et de la RDA. La réunification est alors effective le 3 octobre 1990.
Cependant, cette réunification ne s’est pas faite si facilement. En effet, il existait et existent encore aujourd’hui de profondes inégalités entre l’Allemagne de l’Ouest et l’Allemagne de l’Est, même si elles se réduisent d’année en année. Ainsi, alors qu’à l’Ouest le salaire moyen est de 3340 € par mois, le salaire moyen à l’est est 550 € plus bas en 2019 d’après Eurostat. De plus, l’ensemble des 30 grandes entreprises cotées au Dax, l’indice boursier allemand, ont toutes leur siège à l’ouest. L’Allemagne a cependant agi en subventionnant l’économie à l’est, ce qui a permis une croissance de près de 102 % après la réunification du pays.
Un bouleversement en matière d’équilibres géopolitiques en Europe
La réunification allemande va modifier en profondeur la géopolitique européenne. Dans les années 1980, Margaret Thatcher et François Mitterrand s’étaient énergiquement opposés à la réunification allemande. Celle-ci n’était pendant des années pas même une évidence pour les Allemands eux-mêmes. Thatcher et Mitterrand craignaient notamment le retour d’une Allemagne puissante et remilitarisée et d’un glissement du centre de gravité de l’Europe vers l’est.
Quel est le résultat de cette réunification ? En 2019, l’Allemagne est peuplée de 83 millions d’habitants et son PIB représente près de 4000 milliards d’euros d’après Eurostat. L’Allemagne est par conséquent redevenue une puissance majeure de l’Union européenne. Le pays joue depuis la réunification un rôle de premier plan en matière de politique européenne. C’est notamment le cas de la politique économique et commerciale de l’Union. Les représentants politiques allemands placent la rigueur budgétaire des pays européens à un haut niveau de priorité, ce qui a pu causer de très grandes tensions dans l’Union européenne, notamment entre l’Allemagne et la Grèce, alors en proie à de graves et profondes difficultés économiques. Cet attachement allemand à la lutte contre les dettes publiques s’explique notamment par le traumatisme de la crise de 1929 d’hyperinflation qui avait durement touché l’Allemagne et facilité les tensions à l’origine de la Seconde guerre mondiale. L’Allemagne a donc surmonté une partie des obstacles de la réunification.
Quelle place pour cette Allemagne unifiée dans l’Union européenne ?
Indéniablement, l’Allemagne unifiée pèse sur l’Union européenne et dans le monde. Le pays n’est cependant pas la grande puissance rivale que craignaient Margaret Thatcher et François Mitterrand. En effet, le pays est solidaire et contribue à hauteur de 19,58 milliards d’euros au budget européen, ce qui en fait le premier pays contributeur net de l’Union européenne au budget européen. De plus, sa puissance permet à l’UE tout entière de peser sur la scène commerciale internationale et sa population présente des débouchés certains pour les entreprises des autres États membres de l’Union. N’oublions pas non plus les récents événements et la solidarité dont va faire preuve l’Allemagne avec l’emprunt contracté par l’Union européenne qui sera soutenu par le pays. Depuis la réunification, l’Allemagne défend certes ses intérêts, mais est aussi capable de solidarité avec ses voisins. L’emprunt commun, notamment défendu par le Président de la République Emmanuel Macron, n’est pas la seule mesure de solidarité défendue par l’Allemagne puisque la France et l’Allemagne ont fait des propositions allant dans le sens de plus de solidarité il y a quelques mois.
Il est vrai que l’UE et les États membres ont aidé l’Allemagne à sa réunification et à la réduction des inégalités Est/Ouest par des financements parfois importants. Mais ceux-ci étaient et sont nécessaires pour sortir l’Est de l’Allemagne de ses difficultés économiques et sociales. D’autant que ces inégalités sont le terreau du populisme particulièrement présent dans ces régions. Ainsi, l’AfD (Alternative für Deutschland), parti de droite radicale allemand, fait des scores importants à l’est : 25,3 % des habitants du Land de Saxe ont voté pour l’AfD aux européennes de 2019.
La réunification de l’Allemagne est un événement majeur de l’histoire de l’Europe. Celle-ci a indéniablement bouleversé les équilibres démographiques, économiques et politiques du continent européen. Les conséquences de cette réunification sont toujours présentes et se font ressentir encore aujourd’hui, avec de fortes inégalités entre l’est et l’ouest de l’Allemagne.
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